Bonjour madame, monsieur,
Permettez-moi de prendre contact avec vous avec un certain état d’urgence sur l’état de santé de monsieur Farid Bamouhammad actuellement en fin de vie au CMC de Saint- Gilles.
Je me suis rendue à son chevet il y a deux semaines et ce dimanche. Il y a deux semaines, il était déjà en stade terminal d’un cancer mais hier j’ai pu constater que la situation était devenue alarmante en raison d’une grève de la faim et de la soif entamée la semaine dernière pour abréger ses souffrances et partir plus vite.
Il est alité, grabataire, la peau parcheminée, décharné et se prépare à mourir.
Cela fait plus de 22 ans que je connais monsieur Bamouhammad, en tant que psychologue et fondatrice du Relais Enfants Parents. La directrice, madame Zicot, très bienveillante et soucieuse de la dégradation du détenu m’a accordé à titre exceptionnel des visites en cellule au CMC. Les infirmiers, les surveillants font leur possible mais personne ne souhaite voir quelqu’un mourir en cellule loin de sa famille et ses proches.
La prison n’est pas un service de soins palliatifs, il est de notre devoir, d’offrir une mort humaine et digne. La fin de vie est un chemin éprouvant, je la connais pour avoir accompagné les malades cancéreux pour l’asbl Cancer et Psychologie depuis près de 30 ans. Monsieur Bamouhammad est plein de rages et d’angoisses, ce n’était évidemment pas un détenu facile de son vivant mais est-ce une raison pour le maintenir en cellule dans ses derniers jours ?
Sa maman est très âgée et en mauvaise santé, elle ne peut se rendre à son chevet en prison sans accompagnement.
Le mourant nécessite des soins continus, un relais des proches, des attentions particulières qui ne sont pas possibles en cellule.
Il a les soins de base, la pompe à morphine etc, mais nous parlons ici d’un soin de chaleur humaine et d’un peu de douceur.
Dans son état, monsieur Bamouhammad ne présente pas de risques d’agression, d’évasion ou de guérison à moins d’un miracle.
Le personnel pénitentiaire ne peut répondre à ses demandes d’écoute, de soutien, d’affection. Les aumôniers sont débordés et offrent le meilleur possible.
Je suis moi-même restée hier plus de trois heures car il m’était pénible de partir face à une si grande détresse.
En soins palliatifs, il pourrait appeler à n’importe quel moment et ne pas être seul face à la mort. Les volontaires et la famille auraient la possibilité de lui dire au revoir dans des conditions plus décentes.
Je vous demande de bien vouloir agir très vite pour que monsieur Bamouhammad puisse s’éteindre paisiblement en dehors de la prison.
Recevez, madame, monsieur, l’expression de mes salutations les plus respectueuses.
Je suis à votre disposition pour toute question ou autres échanges.
Sophie Buyse
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