Violence et prévention
 
   
Les dangers de la violence conjugale sur les enfants
"Le viol de Maëlle, la mort de mon fils : que faire pour éviter cela ?"
Comprendre, une voix au cœur de l’innommable
     
   
   
 
    Retour vers...
 
   
Etudes, textes, articles...
     
   

 
      Comprendre, une voix au cœur de l’innommable
   
    Le texte qui suit est une victoire du discernement sur les peurs et l’ignorance, Il est un témoignage bouleversant par les épreuves dont il témoigne et doit être considéré comme un préalable pour des préventions des comportements violents et des récidives.

En 1984 alors que je préparais depuis plus de six mois un projet d’accueil et d’accompagnement pour des adolescents en difficulté, mon fils François fut violé et tué par un jeune homme de 18 ans (Valence le 5 février 1984).

Dès la découverte de l’agresseur (mai 1984) la nécessité de comprendre s’imposa à moi. Je le rencontrerai clandestinement à Lyon en septembre 1989 : suite à une bavure de l’institution judiciaire il avait été remis en liberté (février 1988) ; il sera réincarcéré deux mois après notre rencontre, puis jugé (mars 1990), reconnu coupable, condamné.

Il me faudra quelques années pour m’extraire de ce drame sidérant et me dégager de cette réduction de "pauvre père" sous peine d’en devenir fou. Je consentirai à cette perte, y survivrai et traverserai six années de procédures et d’aléas judiciaires.

Les questions qui s’imposaient à moi résonnaient dans mes mémoires d’enfant blessé, et me conduisaient sur le chemin de ma vulnérabilité. J’étais souvent submergé par des émotions que je vivais comme une menace.... Au fil du temps mes blessures apprivoisées deviendront la pierre angulaire d’un nouvel édifice ; là ou la pacification est possible. Je parvins à mettre à jour mes propres nouages psychologiques, affectifs et sexuels ; mes phobies sociales ; en un mot comme en cent un développement défaillant qui fut source d’angoisses quasi - ontologiques.

Mes besoins essentiels m’étaient devenus inaudibles dès mon enfance et je ressentais cruellement ce malaise plus ou moins bien masqué du manque d’estime de moi...j’avais moi aussi été une victime.

En 1996/98 j’ai vécu des états dépressifs profonds et compris mieux encore ma quête de sens et mes "envies de rien". C’est alors qu’ont émergé mes souvenirs de maltraitances, sévices, négligences et privations de toutes natures ; et mon impuissance à faire face à ce climat de double contrainte éprouvé à mon adolescence quand il s’agissait de grandir dans une société de "progrès" portée par des idéaux de "réussite" inaccessibles à tous ceux qui comme moi venaient de la "Zone".

Les perturbations et troubles que j’avais connus dès mon plus jeune âge étaient semblables à ceux que connaissait l’agresseur de mon fils... ! Pas à pas un lent processus d’éveil et de conscience célébrait la victoire du discernement sur le jugement et la haine ! François, mon fils avait été victime de la détresse d’un "autre".

Mon projet d’accueil et d’accompagnement d’adolescents initialement prévu verra le jour, associé à un long et profond travail psychologique personnel (1984-1995) ; et des années de formation et d’engagements professionnels dans l’accompagnement psychologique des autres, y compris de professionnels du secteur de l’enfance en danger de 1996 à 2004 (supervision clinique).

Au mois de juin 1999, j’ai pris la décision de m’expatrier dans le Haut Atlas ; j’y résiderai 8 années et répondrai à mon besoin de recueillement dans des espaces ressourçants. De mes réflexions et méditations d’alors émergera une compréhension affinée et la mise à jour de mes postulats préventifs d’aujourd’hui.

L’essentiel de ce que j’ai compris est devenu un socle à partir duquel des services et des dispositifs peuvent être mis en place. Dès lors que ne se confondent plus "comprendre et excuser" et que l’on distingue mieux les subtilités éthiques et cliniques de l’épaisseur d’idéologies fondées sur l’ignorance et les peurs.

J’ai compris ceci : Reconnaître, apaiser/consoler, donner une place à celui qui "en nous" peut commettre "le pire" est une nécessité vitale pour soi-même et pour autrui, c’est la conquête d’une place de sujet en mesure de répondre de ce qu’il fait ; faute de quoi nous nous pourrissons la vie. Cela n’implique pas obligatoirement un passage aux assises ; il y a des milliers de façons de se pourrir la vie... et puis, celle de quelques autres.

J’ai compris cela : L’agresseur, le "fou" ou la victime nous invitent à confronter nos identifications et nos peurs et, chemin faisant devenir l’allié de nos besoins revisités. Notre humanisation est à ce prix. Nos violences ne sont-elles pas des appels vers la reconnaissance de ce qui en nous a été mis au placard ? Ici un travail psychologique en profondeur est nécessaire. Là ou il s’agit d’abord d’accueillir l’enfant blessé réapparu et de le consoler.

Et puis encore cela : La sacralisation des victimes et la diabolisation des agresseurs révèlent et masquent les vérités cliniques préventives ; j’en appelle à des réponses suffisamment raisonnées au-delà de toute dualité ; pour inverser la tendance de notre société qui produit invariablement les violences qu’elle dénonce.

Aujourd’hui j’exerce comme praticien de psychothérapies et en psycho-victimologie clinique. Mon projet psycho-social et politique est le fruit du cheminement que je viens de décrire, celui d’un citoyen de la société civile. Il s’articule à une connaissance clinique largement éprouvée qui considère enfin la vérité sur la nature des souffrances troubles/perturbations.

-  Documentaire : "Envie de rien"
-  "La justice est un jeu", Jacques VERGES- Albin Michel 1993
-  "Libération" le 15 novembre 1989- 4 pages dont la chronique de Serge Daney
-  Rue 89 : Jean-Jacques Gerard a publié l’article : Le viol de Maëlle, la mort de mon fils : que faire pour éviter ça ? (2011) (sur ce site)
-  "De chair et de Sens" j-j Gérard et Bertrand Bergier l’Harmattan - 2004
-  Ma page Web :